Les médias pourvoyeurs d’anxiété majeure

La covid-19 a été à l’origine de nombreuses hospitalisations, mais aussi de décès.

Des mesures ont été prises pour dépister, éviter toute propagation , et aussi de traiter les complications en relation avec cette virose.

Durant de nombreux mois la presse de tout poil a développé ce sujet avec un très grand sérieux, voire dans certains cas avec une gravité extrême.

En parallèle depuis quelques semaines une autre affection est à l’origine de reportages et d’articles: la variole du singe.

Bien que sévissant prioritairement au sein de certaines communautés, les médias une nouvelles fois mettent en avant le potentiel de contagiosité important de cette pathologie.

C’est ainsi que le citoyen français béotien dans le domaine de l’infectiologie se réfère aux discours parfois complexes et touffus distillés de manière trop répétitive à la télévision, ce qui majore l’anxiété de nombreuses personnes.

Cela conduit à des comportements parfois peu rationnels et dans certains cas peu humanistes.

Au travers de deux exemples vécus, je souhaite mettre en lumière les travers de cette médiatisation parfois mal interprétée ou parfois trop réductrice.

Le cas de la contamination par la COVID-19

Mme P, présente une toux peu importante.

Cependant compte tenu de l’âge de la patiente (80 ans), de son refus de toute vaccination, et d’un contact éventuel avec une personne ayant contracté la COVID-19, sa fille a effectué à ses frais un test antigénique COVID-19.

C’est ainsi qu’il fut décidé de contacter un confrère par le biais de téléconsultation (les résultats du test ont été connus le samedi après-midi).

En effet, selon l’entourage proche (les enfants) il était urgent d’agir chez cette patiente totalement asymptomatique.

Le confrère consulté en visioconférence montrait sa préoccupation vis à vis de « cette situation complexe », ce qui l’a conduit à lui prescrire une association d’hydrochloroquine et d’acide clavulanique/amoxicilline.

A mon retour le lundi, je suis appelé en urgence au chevet de cette charmante patiente car elle présentait une diarrhée profuse, ce qui perturbait grandement sa fille qui était persuadée que la virose contractée précédemment allait être responsable du décès de sa mère.

Que nenni, en fait la diarrhée était consécutive à l’administration de l’antibiotique, et j’ai bien expliqué en parallèle que le recours à l’hydrochloroquine n’était pas très recommandé chez cette patiente ayant un bbloquant.

Tout cela pour dire que Mme P a reçu un traitement symptomatique pour sa diarrhée d’une durée de 48 heures, et rien d’autre.

Je l’ai revue 15 jours plus tard en pleine forme, cela en ayant interrompu hydrochloroquine et amoxicilline/acide clavulanique

La variole du singe et ses conséquences

M. S, 76 ans, retraité a décidé de quitter précipitamment Paris qu’il ne supportait plus pour venir s’installer dans le sud de la France.

Ce dernier pensait qu’avec une retraite de 1000€ il pourrait en moins d’une semaine trouver un petit appartement dans les Pyrénées Orientales.

Malheureusement aucune proposition de location n’a pu lui être faite, et il s’est trouvé à la rue car ses maigres économies ont fondu comme neige au soleil.

Ayant appelé le 115 (numéro d’urgence gratuit qui permet d’obtenir un hébergement temporaire), il a été orienté cers un CHRS (centre d’hébergement et de réinsertion sociale) sur Perpignan.

Cependant ce dernier présentait des lésions cutanées (bulles cutanées) qui ont préoccupé les éducateurs de ce centre.

Ces derniers pensaient au diagnostic de variole du singe, et un collègue appelé en  renfort au sein de cette structure a validé cette proposition.

En conséquence il a du faire ses bagages car il était potentiellement contaminant pour les autres pensionnaires.

Mis au courant de cette situation, et compte tenu du tableau clinique de ce patient âgé, j’ai décidé de le récupérer rapidement dans un centre d’hébergement.

Une biopsie cutanée a été effectuée alors permettant de réfuter le diagnostic initial.

En fait il s’agissait d’une maladie bulleuse traitée rapidement par topique.

Ce second exemple nous montre une nouvelle fois qu’il ne faut jamais avoir des idées préconçues sur une pathologie « honteuse » qui n’est parfois pas nécessairement celle à laquelle on pense.

Ayons une écoute attentive, mais aussi parfois critique des informations données par les médias.

 

Dr Pierre Frances