Ayons plus de respect et de considération vis à vis des libéraux !

L’activité des médecins libéraux alimente régulièrement les chroniques des journalistes, ou devient le motif d’articles divers (souvent peu flatteurs ou dévalorisants) concernant la santé des français.

En fait depuis quelques années (la Covid a quelque peu mis en veilleuse cette situation) la problématique de la démographie médicale s’est posée, et elle devient un sujet majeur de questionnements et de débats car certaines personnes habitant dans certaines zones ont un accès aux soins très difficile.

En conséquence du fait d’échéances électorales très proches, les futurs candidats se voient contraints de réagir en ce qui concerne un domaine qui concerne la totalité de nos concitoyens électeurs : la santé.

Cependant, force est de constater que les programmes concernant un domaine crucial pour les français reste quelque peu flou ou peu développé.

Il est vrai que l’exécutif est un peu responsable, depuis quelques années, de la faillite de notre système de santé.

Plutôt que de reconnaître les fautes engendrées par un numérus clausus très restrictif et pas très orienté sur la future situation sanitaire du pays, les politiques tout comme l’exécutif préfèrent tirer à boulet rouge sur les médecins pour trouver un bouc émissaire à leur manque de discernement.

C’est ainsi que de manière très subliminale les citoyens abreuvés par divers médias (télévision, portable, journaux) apprennent que les études médicales ont un coût faramineux (ils oublient que les étudiants en fin de cursus sont exploités de manière indécente et totalement inhumaine et qu’ils remboursent intégralement les frais engendrés par leurs études ce qui n’est pas le cas d’autres universités), mais également qu’il va falloir contraindre ces futurs libéraux de s’installer dans des zones déficitaires.

Une vision ambivalente voire méprisante des politiques et autres structures en charge de la santé

De nombreux comportements de politiques et autres personnes « en charge » du monde médical ressentent la nécessité de s’exprimer sur le sujet de la santé.

Leurs propos sont fréquemment clivants, et nous pouvons même dire méprisants pour un grand nombre d’entre eux.

1/ Mme Hidalgo, candidate aux élections sous l’étiquette du parti socialiste, explique aux journalistes qu’il est important de contraindre  les médecins libéraux à assurer les gardes durant les nuits et les dimanches, cela alors que l’adhésion des libéraux à cette charge est basée sur le volontariat (cela n’empêche pas certains préfets dans des zones fortement déficitaires à réquisitionner certains libéraux).

Cette prise de position doit nous faire sourire car il ne faut pas oublier que cette personne rechigne à appliquer les 35 heures pour les agents territoriaux de la mairie de Paris.

Comment est-il possible que Mme Hidalgo puisse accepter que les médecins libéraux travaillent plus de 50 heures, alors qu’elle refuse d’appliquer le règlement de toute collectivité avec un temps de travail hebdomadaire de 35 heures ?

2/ M. Fantôme, directeur de la CNAM explique « qu’il est content de prendre un rendez-vous à 19 heures », cela lorsqu’on lui parle d’élargir la période de permanence de soins.

Ce comportement est quelque peu méprisant de la part de cet énarque qui dirige une équipe très fournie qui dès 17 heures déserte les bureaux.

Pour M. Fantôme il est tout à fait normal dans une société où les loisirs et les 35 heures sont légion, que les libéraux acceptent eux de se sacrifier et travaillent plus de 50 heures par semaine.

Tout aussi déroutant est de voir que les services de ce haut fonctionnaire ont fait de la publicité auprès des médecins libéraux pour recruter plus de 200 médecins conseils, cela alors que le déficit dans le secteur privé (c’est ce secteur qui prend en charge plus de 80% des patients nous ne devons pas l’oublier) est colossal, et qu’il est possible de déléguer certaines tâches à des administratifs (ils le font par ailleurs régulièrement).

A aucun moment M Fantôme n’a soulevé la question d’une revalorisation des heures supplémentaires au-delà des 35 heures réglementaires chez les libéraux.

3/ M. Valletoux président de la Fédération Hospitalière de France  a exhorté les libéraux à rester disponibles durant les vacances de noël.

Pour cet administratif il était important que les soignants exerçant dans le privé modifient leur période de congés pour que la continuité des soins soit assurée.

De cette manière les hospitaliers auraient pu travailler dans des conditions satisfaisantes, et auraient pu s’absenter sur cette même période.

Il est vrai qu’ils sont épuisés par la pandémie, et méritent ces vacances, ce qui n’est pas le cas des professionnels du privé qui malgré tout ont affronté la vague COVID avec de nombreux risques.

Pourquoi M. Valletoux n’a-t-il pas demandé aux enseignants de travailler durant la période de noël pour rattraper les retards scolaires (ils sont énormes) que de nombreux élèves ont subis du fait du COVID ?

4/ De nombreux politiques et édiles agitent le chiffon de la coercition pour les futures générations de libéraux.

Ils oublient qu’il est aisé de contraindre une installation dans une zone où les services publics ont été réduits à la portion congrue pour des raisons budgétaires.

Il est tout aussi critiquable, et inconscient d’exiger que des jeunes médecins aillent dans certaines banlieues dépourvues de médecins par le simple fait que la sécurité de ces derniers n’est pas assurée de manière satisfaisante.

On accepte que les médecins se fassent molester dans des zones de non droit, alors que la force publique refuse d’y aller !

De plus le manque de discernement concernant la pénurie médicale de ces maires ou députés est quelque peu révoltant.

En effet, les déserts médicaux existent dans les campagnes, les banlieues, mais aussi les villes.

Le déficit en médecin est tel que dans certaines grandes villes (et elles sont nombreuses) il est impossible de trouver un médecin traitant.

Ce constat est plus qu’alarmant, mais visiblement n’a jamais été pris en compte par des personnes responsables du bon fonctionnement de notre système de santé ; cela est pitoyable !

5/ L’exécutif qui au début de la pandémie n’a pas voulu mettre en avant le rôle primordial des médecins libéraux et des structures privées dans la gestion du COVID.

Notre ministre de la santé a du au bout de quelques mois reconnaître à demi-mot (cela lui a écorché es lèvres), le rôle primordial des libéraux dans la gestion de crise sanitaire.

Tout aussi inconcevable est de voir que les différents ministères (la santé en est un), alors que le nombre de fonctionnaires affectés dans les différents services est pléthorique, se permettent de demander la contribution de sociétés conseils pour une note au final très salée de plusieurs milliards d’euros.

Cette situation dénote quelque peu avec le blocage de toute idée de revalorisation d’une profession corvéable à merci.

Un avenir peu réjouissant pour les libéraux, mais quelques rayons de soleil malgré tout illuminent leur quotidien morose

Les médecins libéraux sacrifient souvent leur vie privée (les jeunes générations refusent cette situation et nous pouvons les comprendre) pour axer leur action sur leur métier et les patients.

Or les brimades des patients, des caisses, des différentes administrations qui demandent de plus en plus de justificatifs, et enfin des politiques qui méprisent souvent le travail des libéraux, sont à l’origine d’un épuisement professionnel et dans certains cas une réorientation de ces petites mains indispensable pour notre système de santé.

L’exécutif oublie trop souvent que le taux de suicide chez les médecins est plus élevé que le reste de la population (2,4 fois plus qu’au sein de la population générale) (1).

Ce chiffre date des années 2000, et il est probable qu’il est bien plus important actuellement.

Cependant le CNOM très féru de statistiques n’a pas de données fiables sur ce sujet.

Néanmoins, malgré toutes ces vexations et désillusions, les libéraux sont pour la très grande majorité d’entre eux attachés à leur métier.

Dans certains cas les satisfactions apportées par les remerciements des patients (ils sont cependant assez rares) ou le plaisir d’avoir eu l’éclair de génie de trouver une pathologie et de ce fait guérir certaines personnes, donnent souvent du baume au cœur et demeurent la force qui permet d’avancer.

Tout aussi intéressant est la participation à la formation des étudiants dans les cabinets de médecine générale qui donne la possibilité d’échanger et de valoriser sa pratique.

Ainsi, les très jeunes étudiants (4ème année) qui viennent travailler dans notre centre sont ceux qui nous apportent le plus, parfois plus que les internes de 7ème année.

Cette participation rompt la monotonie, et c’est également une opportunité pour développer des argumentaires parfois contradictoires.

En effet, au-delà du questionnement de ces futurs confrères qui augmente la durée d’une consultation (cela ne nous offusque pas du tout), nous voyons que ces jeunes sont émerveillés de se frotter à un monde qu’ils ne connaissent pas.

De plus cette confrontation permet à tous d’améliorer ses connaissances, et de ce fait favoriser une approche du patient plus pragmatique.

Au départ ces jeunes venaient une semaine durant les congés d’été, mais très vite il a été décidé d’envoyer ces jeunes dans des cabinets libéraux durant 1 mois, ce qui valorise d’autant plus la médecine générale, et évite également la lassitude d’un quotidien parfois morose.

D’autre part, il est souvent très positif de garder le contact avec ces futurs confrères et nouer des liens, ce qui évite tout isolement pour nous et pour eux également.

Enfin, travailler en équipe est parfois difficile au départ (souhait de ne pas confronter ses propres carences intellectuelles), mais au final cela se révèle très valorisant car cela apporte du dynamisme dans notre pratique.

C’est la raison qui conduit d’ailleurs de nombreux jeunes à vouloir travailler en équipe, et permet malgré les frustrations régulières de tenir bon.

 

 

  1. Les chiffres introuvables des suicides des médecins français. https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/les-chiffres-introuvables-du-suicide-des-medecins-francais.

Dr Pierre Frances