Du rififi concernant la fin de vie

Différents quotidiens locaux et nationaux ont relayé, il y a quelques jours de cela, les propos d’associations en charge d’unités en soins palliatifs.

Leur but était de manifester leur mécontentement en cas de changement de paradigme concernant la fin de vie.

En effet certaines structures très militantes veulent que le législateur permette aux patients le souhaitant de mourir « dans la dignité » grâce au suicide assisté ou l’euthanasie.

Cette prise de position va bien entendu à l’encontre des associations en charge des soins palliatifs qui ont choisi une alternative différente.

Pourquoi une telle peur de la part des associations en charge des soins palliatifs ?

Depuis quelques années les médias ne cessent de relayer différents faits divers concernant des patients qui ont bénéficié de l’aide de confrère pour abréger leur vie.

Ces actions répréhensibles sont l’occasion de voir des débats passionnés concernant la fin de vie.

En parallèle, sans aucune pudeur, des patients se mettent en avant pour faire de la promotion vis-à-vis du suicide assisté.

Compte tenu de ces situations qui vont en l’encontre de la bonne morale, et de la loi française concernant la fin de vie, l’exécutif a décidé de dépoussiérer le cadre législatif concernant ce domaine.

En nous y penchant de plus près, nous ne pouvons qu’être quelque peu circonspects vis-à-vis de cette attitude de la part du gouvernement.

En effet ne me positionnant en tant que soignant je peux vous dire que la loi Léonetti est adaptée à la fin de vie, et je ne comprends pas réellement les raisons de tels éternuements.

Cependant au premier abord  il est facile de se satisfaire d’une loi qui nécessite l’intervention de différents professionnels de santé au chevet des patients, car elle évite toute souffrance exagérée.

En ce qui nous concerne (je parle au nom de mon cabinet) prendre en charge un patient à domicile en soins palliatif est un poids énorme.

Notre présence auprès du patient doit être quotidienne, et nécessite souvent le concours d’infirmières qui peuvent agir en cas de problèmes (ils sont nombreux), cela avant notre intervention fréquemment nécessaire.

Quels sont les professionnels de santé qui acceptent un tel engagement ?

Actuellement très peu, et ce d’autant plus que nous n’arrêtons pas de recueillir des témoignages de patients ne trouvant pas la possibilité d’être acceptés dans la file active d’un médecin traitant.

De plus la valorisation pécuniaire des professionnels de santé concernant ce domaine n’est pas réellement une des priorités du gouvernement, situation qui décourage de nombreux professionnels de santé.

Bien sûr on vous dira que des efforts ont été effectués pour soutenir les équipes avec des unités dédiées aux soins palliatifs.

Dans la réalité il ne s’agit que de saupoudrage car ces structures fonctionnent avec peu de personnel, et uniquement la journée (entre 9h et 17 heures chez nous) pour la grande majorité d’entre elles.

Tout aussi inconvenant est la part des lits d’hospitalisation dédiés aux soins palliatifs au sein des départements : il est ridiculement faible.

Or les différents acteurs impliqués dans ce domaine (professionnels de santé et souvent familles) aimeraient avoir une possibilité de souffler quelques jours lors de cette prise en charge parfois d’assez longue durée, ce qui n’est quasiment pas le cas actuellement.

Autrement dit, les discussions concernant l’euthanasie et le suicide assisté sont quelque peu parasitées par le fait que gérer au domicile les soins palliatifs est fréquemment un exercice impossible à gérer.

C’est, je le pense, la raison pécuniaire qui pousse nos dirigeants à adopter une telle initiative, et incite ces membres de l’exécutif à relancer le débat très passionné.

Cependant en ouvrant de cette manière la boite de pandore on risque, j’en suis certain,  d’observer des dérives inadmissibles concernant la fin de vie.

Dr Pierre Frances