L’exécutif a défini, il y a quelques semaines de cela une cartographie de 151 zones prioritaires pour lesquelles « un pacte de de lutte contre la pénurie des professionnels de santé » devait être effective.
Cette « photographie des déserts médicaux » concerne en fait près de 2,5 millions de citoyens, ce qui n’est évidemment pas une paille.
Le but de cette démarche, qui semble à première vue louable, est de permettre un meilleur accès aux soins pour tous nos compatriotes (un des responsables d’une association en charge du soin expliquait que certains citoyens n’avaient pas accès aux soins alors qu’ils étaient des gros contribuables).
Les pouvoirs publics ont voulu montrer de cette manière qu’ils n’étaient pas insensibles à la détresse de certaines personnes isolées, cela d’autant plus qu’ils étaient peinés par la situation de personnes n’ayant plus la possibilité d’une prise en charge médicale adaptée.
Dans notre département une zone demeure problématique du fait de départs de plusieurs médecins.
Nos têtes pensantes ont été très réactives pour qu’une aire préalablement définie par nos énarques (elle est située dans la montagne) fasse partie des 151 intercommunalités prioritaires pour l’accès aux soins.
La ministre de la santé (Mme Vautrin) a voulu par son message être claire sur les intentions de ce zonage : « L’accès aux soins ne peut plus dépendre uniquement de la bonne volonté, et du sacrifice de quelques-uns, il doit être garanti dans un principe de solidarité et de fraternité ».
Ces propos assez justes peuvent donner la chair de poule car notre ministre nous donne une leçon d’humanité, mais aussi souhaite restaurer le sens des valeurs au sein de notre société (nous en manquons je le pense terriblement actuellement).
Cette dernière souhaite par cette mesure inciter les professionnels de santé à se serrer les coudes pour que les territoires non pourvus en professionnels de santé bénéficient d’une aide dans ce domaine.
Pour ce faire elle bénéficie d’appuis de choix : les ARS et les centres de sécurité sociale.
Le but est avant tout de faire preuve d’originalité pour aller au-devant des patients les plus nécessiteux en soins.
Des actions au premier abord satisfaisante, mais pouvant être l’objet de discussion quant à leur efficacité
Dans notre département la zone définie comme étant prioritaire va faire l’objet d’une mesure originale, déjà prise en compte au sein d’autres territoires : la circulation d’un bus itinérant avec à son bord des médecins.
Cette idée semble à première vue très alléchante, mais certaines problématiques en rapport avec cette idée doivent être soulevées :
- Quels sont les médecins qui accepteront de participer « à ce challenge »?
- Les médecins investis à cette tâche ne vont-ils pas délaisser leur propre patientèle de ce fait ?
- La population sera-t-elle au rendez-vous de ce médico-bus ? On peut être interrogatif vis-à-vis de cette affirmation car certaines personnes auront des difficultés à accepter que les professionnels consultés soient différents à chaque consultation. L’efficience de la pratique médicale repose sur la relation médecin-malade, ce qui est souvent balayé d’un revers de main par les pouvoirs publics.
- Le médico-bus sera-t-Il rentable en ce qui concerne l’activité professionnelle des soignants? Avoir un centre à égale distance entre les localités concernées par ce zonage, ne serait-il pas plus logique, et éviterait-il de cette manière de faire de la médecine foraine ?
Nous comprenons le désarroi des pouvoirs publics vis-à-vis des déserts médicaux, mais il demeure à mon avis primordial dans un premier temps de réunir l’ensemble des acteurs de la santé pour définir les priorités, et la manière d’agir.
En travaillant sans concertations avec les acteurs de terrain on a des chances de ne pas avoir des résultats à la hauteur des espérances.
Très récemment le Quotidien du Médecin s’est fait l’écho d’une initiative très louable en Occitanie : la revitalisation de certains déserts hospitaliers.
A l’initiative d’un PH-PH cette association permet une dynamique très positive en matière de santé sur le territoire qui souffrait d’un manque cruel de soins dans le secteur hospitalier (problématiques des petits CH).
Bien entendu les politiques montrent de manière régulière leur implication faisant suite à cette initiative, mais nous ne devons pas oublier qu’elle est en très grande partie l’œuvre des médecins.
Cet exemple nous montre que les professionnels de santé savent de retrousser les manches, et sont capables de se mobiliser dans le cas de pénurie.
Ils n’ont pas nécessairement besoin des politiques pour œuvrer, et même nous pourrions dire l’action de ces acteurs non soignants peut être décourageante pour les soignants.
D’autre part il est important également de souligner que les zones préalablement définies ne sont que le sommet d’un iceberg qui est assez volumineux (il est démesuré malgré la fonte des glaces voulue par le gouvernement grâce à la suppression du numérus apertus).
En effet, en y regardant de plus près la région parisienne (ce n’est pas la seule à être dans ce cas de figure) n’est pas théoriquement en réelle détresse, mais dans la réalité de nombreux patients en villégiature dans notre secteur nous font part de leur impossibilité d’une prise en charge par un médecin généraliste.
J’ai dû pour un patient vivant dans la banlieue de Paris, et ayant une pathologie cardiaque grave, remplir un dossier d’ALD car il n’arrivait pas à trouver de médecin traitant voulant l’accepter (ce n’est pourtant pas un patient très revendicatif).
La situation actuelle est assez complexe, et les médecins ont des difficultés à accomplir un travail de qualité du fait l’afflux des patients.
Cependant dans les années qui vont venir la charge de travail a de grandes chances de s’accentuer, cela du fait d’une réactivité de nos pouvoirs publics très tardive.
Et là nous aurons des réelles difficultés à y faire face, cela d’autant plus que l’exécutif est toujours rassurant malgré une gestion de notre système de santé souvent chaotique.
Le ministre de la santé (M. Neuder) l’a répété à l’envie lors de sa visite au sein des urgences d’un CHU de Paris : « La situation actuelle est plutôt maitrisée ».
Mais comme l’a souligné un syndicaliste travaillant dans les structures des urgences, les fermetures de certaines de ces unités sont récurrentes, et posent des problèmes pour la population du secteur impacté.
Une idée…
Je suis médecin retraité et je veux bien comme sûrement d’autres médecins jeunes retraités, dépanner dans les déserts médicaux.
Mais il faudrait trouver une solution de salariat car je n’ ai plus de feuilles de soins car je ne fais que des remplacements.
Hôpital ? Mairie ? ARS ?
Je n’ ai pas d’idée mais les politiques en ont sûrement et peut être l’ordre ?