Récemment nous avons appris que la réserve sanitaire allait pallier au manque de professionnels au CHU de Caen du fait d’une pénurie de ces soignants.
Alors que très régulièrement syndicats, mais aussi journalistes tirent la sonnette d’alarme pour informer des fermetures des urgences de petits hôpitaux périphériques (l’été dernier malgré les propos rassurant du ministre de la santé de nombreuses unités étaient en surchauffe, ou ne pouvaient pas accueillir des patients), nous voyons que certains, qui sont universitaires, souffrent des mêmes maux.
Depuis quelques années l’exécutif est conscient des difficultés vécues par ces unités qui peinent à garder des soignants investis dans leur mission.
Il est vrai que travailler dans un service des urgences est parfois difficile sur un plan physique, mais aussi psychologique.
Ce qui est quelque peu surprenant, c’est de voir que des mesurettes sont prises pour faire face à la pénurie d’urgentistes, cela sans aucune concertation avec la base qui œuvre malgré tout pour avoir une prise en charge de qualité.
Ces professionnels en charge de la santé de nos concitoyens réalisent un travail formidable, mais les politiques n’en tiennent pas véritablement compte (ils regardent avant tout l’image que les électeurs potentiels peuvent avoir d’eux).
Outre le fait que certains urgentistes travaillent d’arrache-pied, acceptent de venir durant les congés au détriment de leur vie privée, aucune reconnaissance de la part des administratifs (eux travaillent 35 heures je peux vous le dire) n’est actée.
Ce qui est quelque peu dérangeant dans cette histoire, c’est de voir que des mesures sont proposées par nos énarques bien assis dans leur tour d’ivoire, mais leur mise en œuvre n’est pas nécessairement appliquée, ou très partiellement.
Ainsi notre ancienne consœur Mme Buzyn avait demandé de repeindre les halls d’entrée des services d’urgences pour rendre plus convivial l’accueil (je ne vois pas trop comment cette mesure peut améliorer le fonctionnement des unités d’urgence), et avait martelé le fait que les patients âgés devaient être pris en charge dans le service de gérontologie pour améliorer de cette manière la qualité des soins.
Cette dernière proposition, pas nécessairement idiote s’est heurtée malheureusement à plusieurs écueils : le manque de places dans ces structures, et la pénurie de soignants permettant de réaliser des soins en adéquation avec la santé de ces patients.
Un député de la majorité présidentielle actuelle (il dirige, si je ne me trompe pas, les urgences du CHU de Bordeaux) avait demandé que les « petits maux » reçus aux urgences devaient être réorientés vers des généralistes du secteur qui devaient les recevoir en urgence.
Le libéral impliqué dans ce choix allait être payé comme une consultation normale, et l’administration hospitalière initiatrice de ce « coup de pouce » devait recevoir 2 fois le montant alloué au généraliste volontaire pour avoir uniquement eu comme tâche d’envoyer le patient vers le professionnel de santé.
Bien entendu cette mesure n’a pas eu la faveur des praticiens de ville, débordés il faut le dire, mais elle a eu l’avantage de générer des dépenses budgétaires du fait des palabres nécessaires pour la concevoir.
Il a été également demandé aux agents hospitaliers de faire payer les petites urgences ne nécessitant pas un passage dans une unité hospitalière.
Sur le papier cette proposition semble assez correcte, mais elle n’est jamais appliquée.
Des solutions existent, mais il faut avoir le courage de les appliquer !
Il y a quelques mois de cela un collègue nous avait interpellé lors d’une séance au conseil de l’ordre de notre département.
Ce dernier expliquait que dans les pays nordiques on n’assistait pas à une saturation des services des urgences.
La réponse d’un confrère présent dans la salle a été claire comme de l’eau de roche concernant cette constatation.
En fait dans les pays du nord de l’Europe les patients paient une certaine somme pour être pris en charge dans les services des urgences.
C’est en demandant une participation aux citoyens que nous pourrons désengorger les urgences de nos hôpitaux, et de cette manière assurer l’attractivité de ces unités aux urgentistes harassés par la charge de travail favorisée par des entrées en inadéquation avec la fonction primaire de ces unités.
Pour l’heure dans notre département (je ne pense pas que ce soit le seul qui soit impacté par de telles mesures) les professionnels de santé doivent prendre leur téléphone pour avertir de la venue d’un patient dans l’unité d’urgence hospitalière.
Cette situation est chronophage pour le régulateur du 15, et pour le médecin qui est déjà débordé, et qui doit attendre durant de très longues minutes que l’appel soit pris en compte (le transfert n’étant pas nécessairement accepté).
Cette initiative a le mérite de limiter quelque peu les entrées dans les services des urgences (ils reçoivent encore et toujours des patients ne nécessitant pas cette prise en charge malgré tout), mais sont très stressantes pour les libéraux.
Le citoyen lambda (je ne parle pas pour tous) oublie trop facilement que la santé a un coût, et n’a pas de scrupules à engorger les urgences pour des maux qui peuvent être pris en charge à l’extérieur des centres hospitaliers.
Il faut cependant ne pas oublier que les politiques de tout poil ont toujours voulu que la santé soit une priorité (je le conçois tout à fait).
Dans un but électoraliste ils n’ont jamais voulu que les français paient à leur juste valeur toute dépense concernant leur santé, cela alors que les soins sont parfois coûteux (cas des traitement anticancéreux, des séjours en réanimation…).
Enfin il semble nécessaire que les « forces vives » de ce pays qui prennent des initiatives législatives écoutent la base.
C’est en agissant de la sorte que nous pouvons trouver des solutions, cela sans avoir des idéaux trop utopiques.
Les administratifs n’ont pas à mener le bal des réflexions concernant cette triste situation qui amène au burn out des urgentistes !